Violences faites aux femmes : une (dé)marche positive

Paris, une dizaine de degrés, sous un ciel gris et lourd, une nuée de pancartes violettes s’avance vers la place de la République. #Noustoutes a fondé cette organisation il y a maintenant plus de six mois, expressément pour rassembler tous les courants de la lutte féministe le temps d’une marche. Le Halo Magazine s’est rendu sur place.

L’appel avait été lancé sur Mediapart et France Inter en début de semaine. Plus de 250 personnalités appelaient à venir manifester. Des personnalités au profil varié, venant de tous les horizons, comme les chanteurs Catherine Ringer ou Arthur H, l’artiste plasticienne Orlan, la photographe Charlotte Abramow, ainsi que les actrices Karine Viard ou bien Muriel Robin (incitatrice de la première manifestation ayant eu lieu le 6 octobre). Une vidéo avait aussi été diffusée par le Huffington Post où des personnalités masculines s’imaginaient des agressions faites aux femmes transférées aux hommes. On entend alors Guillaume Maurice s’exclamer: « Eh imaginez que les femmes, même les femmes plus âgées vous suivaient dans la rue en matant vos couilles ! ». Les manifestants ont répondu présent à cet appel: #Noustoutes annonçaient samedi en fin de journée, plus de 30 000 manifestants à Paris (12 000 selon la police). On a pu y croiser des femmes de tous les âges mais aussi des hommes et des enfants, la lutte a touché un panel large d’individu, de confessions et d’origines différentes. On a même pu voir quelques gilets jaunes se glisser dans la foule pour apporter leur soutien à cette cause.

Pour un jeune étudiant de 21 ans comme Nathan, c’était l’occasion de venir affirmer sa solidarité avec les mouvements féministes. Il assène avoir trop entendu parler d’agression et de harcèlement de la part de ses amies proches, il était inconcevable pour lui de ne pas être présent samedi pour afficher sa volonté de faire évoluer les choses. Yoan nous a déclaré quant à lui que « Le féminisme ce n’est pas seulement un mot ». En effet, elles/ils nous l’ont prouvé c’est aussi une action et une mentalité, qui n’est pas forcément restreint au genre féminin.

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© Swati Devichi 2018

ÉCOUTE, NON JUGEMENT, SOUTIEN

Cette manifestation avait pour but d’interpeller directement le gouvernement, pour qu’il se saisisse du problème à la fois financièrement (apporter plus de soutien aux associations, aux plannings familiaux…) mais aussi d’un point de vue législatif. Au delà de cet appel à l’exécutif et aux parlementaires, on a pu ressentir une volonté de sensibiliser à l’écoute et à l’entraide mais aussi à la libération de la parole féminine. Les membres de l’association ont distribué des tracts avec « un mémo à toujours garder sur soi pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles », ainsi qu’un exemplier de brèves réponses a apporter à une victime, ainsi que des mots importants « ECOUTE » , “NON JUGEMENT” ou encore “SOUTIEN ». Tout un tas d’informations qui convergent vers le même but : l’attention à l’autre et la prise en compte de la parole féminine. Cela résume bien l’ambiance générale de cette manifestation lumineuse, où la musique et les rires ont accompagné les pancartes colorées des manifestants.

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© Swati Devichi 2018

Car en effet, ils ont redoublé de créativité pour l’occasion. Entre collectif artistique et performance individuelle, l’heure était au jeu de mot. « Ras le Viol » était inscrit sur les pancartes violettes données aux manifestants par le groupe “Nous Toutes”. On a aussi pu lire le grinçant: « La Cup est pleine ». D’autres résonnaient avec l’actualité de ces dernières semaines.

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© Swati Devichi 2018

« Tous marcher sous le même drapeau »

De nombreuses pancartes ont fleuri, affublées de sous-vêtements féminins, avec la mention « Ceci n’est pas du consentement. » en rappel avec la polémique irlandaise du 13 novembre dernier. Un homme de 27 ans a été relaxé à la suite d’une condamnation pour viol car sa victime portait un string. Cette affaire a provoqué la réaction de Ruth Coppinger, membre du parti socialiste qui a brandi une culotte en dentelle lors d’une séance au parlement afin de dénoncer les violences faites aux femmes. Le symbole a été repris avec ferveur lors de la manifestation de samedi, avec pour but de rappeler qu’un vêtement n’est pas un signe de consentement.

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© Swati Devichi 2018

Enfin, cette manifestation était l’occasion de voir rassembler différentes mouvances et diverses problématiques auxquelles font face les luttes féministes aujourd’hui. On a discuté quelque instants avec Lila, qui se définit elle-même comme une « petite main » du mouvement “Nous Toutes”. Elle nous a confié exaltée que l’« idée était de tous marcher sous le même drapeau. On a vu des cortèges de femmes musulmanes marcher à côté des travailleuses du sexe ! ». Cette initiative était l’expression d’un profond besoin de se réunir et de se retrouver ensemble dans une ambiance positive, propice à l’apaisement et à la libération de la parole. Autant de voix qui se sont élevées à l’unisson le temps d’une après-midi.

Lila Casidanus

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